Quelle place voulons-nous pour les universités ?

Financement de l'Université
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Christian ROBLEDO, Président de l’Université d’Angers, Président de l’AUREF

Les études[1][2] se suivent et convergent toutes pour dire que les universités dans leur grande majorité sont asphyxiées par un manque structurel d’accompagnement financier.

L’Université a su répondre depuis la fin des années 60 aux défis que la Nation lui a assignés, ceux de la formation d’une jeunesse de plus en plus nombreuse aux aspirations d’ascenseur social légitimes.

Des 650 000 étudiants du début des années 70, l’Université accueille aujourd’hui 3 fois plus d’étudiants, avec une efficacité sociale et économique avérée. Une étude récente montre que les gains en termes de revenu permanent augmentent avec le niveau de formation. A ce gain individuel s’ajoutent des bénéfices sociétaux. Une société dont le niveau moyen de formation et d’éducation augmente se donne les chances de rester dans la compétition internationale.

La formation n’est donc pas un coût mais bel et bien un investissement sur l’avenir. Les Universités y participent tant par leur activité de recherche que par la formation.

Mais aujourd’hui les universités sont étouffées au moment même où tout concourt à la nécessité de les valoriser. L’afflux massif des étudiants auxquels elles font face s’est soldé par une détérioration sans précédent de leur dotation par étudiant, dotation en baisse constante depuis 2011. Elles sont entrées dans une spirale d’économies d’échelle et les conditions d’exercice de leurs missions ne cessent de se dégrader. Dans ce contexte, tout étudiant supplémentaire accueilli concourt à la détérioration de la qualité des conditions d’études et de formation qu’il est en droit d’attendre.

Deux pistes sont alors possibles pour résoudre ce problème.

Ramener les capacités d’accueil des universités en licence et en master à un standard acceptable qui garantit la qualité de la formation proposée, ou augmenter les moyens dont elles peuvent disposer.

L’augmentation du nombre de bacheliers, politique assumée par l’Etat depuis plus de 20 ans, tout comme le résultat des études citées plus haut ne militent pas pour une politique malthusienne en la matière qui ne serait pas une réponse pertinente à la demande sociale.

Seule la deuxième option est envisageable. Mais comment ? L’option qui sera choisie sera étroitement liée au choix de la Nation pour les universités.

Si l’augmentation du financement repose uniquement sur les ressources propres que sont capables de générer les universités (dont les droits d’inscription même accompagnés d’un système de bourse plus large ou de prêts intelligents), nous irions immanquablement vers une individualisation du financement qui entrerait en contradiction avec le droit à la poursuite d’études dans le supérieur qu’ouvre le baccalauréat et qu’assigne l’Etat aux universités. Il y a alors tout lieu de penser qu’à un processus malthusien se couple un processus darwinien !

La seule option qui reste cohérente et en lien avec la mission de service public qu’assument aujourd’hui les universités est un effort important d’investissement dans l’enseignement supérieur universitaire pour assurer au plus grand nombre de nos jeunes des perspectives de formation de qualité, leur assurant une insertion professionnelle à la hauteur de leurs aspirations.

Il restera malgré tout à veiller que cet effort permette aussi un accès à l’enseignement supérieur équitable sur l’ensemble du territoire. Tout comme on ne peut accepter que l’accès à la santé soit différent d’un territoire à l’autre, il en est de même pour notre jeunesse en termes de formation universitaire.

Les universités membres de l’AUREF demandent qu’une véritable loi de programmation pluriannuelle de soutien à l’enseignement supérieur figure parmi les priorités du futur mandat présidentiel !

[1] Fack G., Huilery E., « Enseignement Supérieur : pour un investissement plus juste et plus efficace », Conseil d’analyse économique, n°68, Décembre 2021.

[2] Institut Montaigne, « Enseignement Supérieur et recherche : il est temps d’agir », rapport avril 2021.